Le sujet était au centre d’un débat dans la capitale sénégalaise, le 26 juin 2018.

Maintien de la paix en Afrique, politique de défense européenne dans les crises africaines…autant d’interrogations soulevées face par la fondation Konrad Adenauer, organisateur de la rencontre de ce 26 juin courant, à Dakar. Principal interlocuteur, Mactar Kamara. Professeur agrégé de droit public à la Faculté de droit de l’Ucad et spécialiste des relations internationales, Mactar Kamara n’a pas fait dans la langue de poche. Préoccupation centrale : «Est-ce que la France ne se réfugie pas derrière les politiques européennes de défense et de sécurité pour maintenir sa domination en Afrique et préserver ses intérêts ?»

«La France cherche à impliquer ses partenaires européens dans la gestion des crises, en particulier les crises qui se déroulent dans son pré carré. Ce faisant, l’ancienne puissance coloniale maintient son influence en Afrique subsaharienne», ponctue Pr. Mactar Kamara, selon le site d’informations www.toutinfo.net . Pour l’expert, la France «a tout à y gagner en termes d’économie budgétaire et en moyens humains. Ce ne sont pas seulement les soldats français qui vont s’impliquer militairement sur le terrain ; mais également  soldats Allemands, Belges et Anglais.» Cette coalition de forces européenne est nécessaire pour la France parce que «une intervention militaire multilatérale européenne est toujours mieux perçue par l’opinion publique africaine qu’une intervention unilatérale française. D’autant qu’une présence française est toujours suspectée d’être fondée sur des visées néocolonialistes, sur des arrières pensées impérialistes. Donc sous couvert de politique européenne de défense et de sécurité il arrive que la France soit en réalité à la manœuvre pour maintenir son influence en Afrique tout en accordant une certaine légitimité aux yeux de l’opinion publique à ses politiques africaines

Dans son argumentaire, le spécialiste des relations internationales pousse la réflexion. «L’Afrique est un banc d’essai pour des expérimentations hasardeuses. Tant qu’il n’y a pas de volonté politique sincère, l’Afrique subsaharienne ne sera jamais en mesure de prendre en charge ses enjeux de sécurité et sera toujours en remorque des forces de l’Union européenne. Puisque la première opération de l’Union Européenne déployée de par le monde a été en Afrique.» Pour l’orateur, l’Europe n’est pas dans une stratégie de formation des forces militaires africaines. Il revient sur l’opération Artémis en 2003 dans l’Iturie en République démocratique du Congo. Qui représente la première intervention de l’Europe sur le territoire africain. D’autres crises suivies d’interventions «rapides», peu ou prou réussies de l’Otan, continuent d’être enregistrées. «Cette politique européenne de sécurité et de défense ne saurait sortir l’Afrique des crises», dixit Pr Mactar Kamara. Qui avoue néanmoins que «la politique européenne de défense et de sécurité en Afrique subsaharienne n’est rien d’autre qu’une alternative à l’absence d’une politique de défense Africaine

Valgadine TONGA