Depuis le samedi 14 juillet 2018, des images et des vidéos circulent sur les réseaux sociaux, montrant des citoyens mettant du feu sur des T-Shirts et une plaque aux effigies du parti politique dénommé Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (Mrc).
La scène se passe visiblement sous le regard du président de l’Assemblée nationale du Cameroun Cavaye Yeguie Djibril, habillé en tenue de son parti Rdpc.
D’après des sources concordantes, quatre membres du gouvernement étaient aussi présents. Ces mêmes sources précisent que le meeting a été organisé spécialement pour faire démissionner les militants du Mrc et les amener à rejoindre le Rdpc.
La scène qui est bien réelle, s’est déroulée à Maroua, dans la Région de l’Extrême Nord, à l’initiative de Cavaye Yeguie Djibril lui-même, en sa qualité de chef de la délégation permanente régionale du comité central du Rdpc pour l’Extrême-Nord. Dans un journal local, il n’a pas nié ces actes d’ostracisme grave, et les a plutôt justifié en ces termes : « Les habits du parti du Rdpc sont aussi souvent brûlés de la sorte. »
L’Ong 1 Monde Avenir note la gravite de ces agissements ainsi perpétrés alors que le vendredi 13 juillet 2018, le président du Mrc, Maurice Kamto, avait fait déposer son dossier de candidature à l’élection présidentielle du 7 octobre 2018.
L’Ong 1 Monde Avenir et ses partenaires associatifs dénoncent avec véhémence ces actes d’une autre époque, cautionnés par Monsieur Cavaye Yeguie Djibril, Président de l’Assemblée Nationale, troisième personnalité de l’Etat du Cameroun.
L’Ong 1 Monde Avenir relève que cette scène macabre est le Cameroun en délicatesse avec ses engagements internationaux, et notamment à l’égard :
- de la Déclaration universelle sur la démocratie adoptée par 128 pays parmi lesquelles le Cameroun lors de la 161ème session du Conseil interparlementaire en 1997, et dont le principe 5 stipule que « L’état de démocratie garantit que les processus d’accession au pouvoir et d’exercice et d’alternance du pouvoir permettent une libre concurrence politique et émanent d’une participation populaire ouverte, libre et non discriminatoire, exercée en accord avec la règle de droit, tant dans son esprit que dans sa lettre »
- de la Charte Africaine de la Démocratie, des Election et de la Gouvernance, dans ses directives suivantes relatives aux engagements des Etats membres :
L’Art 3 alinéa 11 exige « le renforcement du pluralisme politique, notamment par la reconnaissance du rôle, des droits et des obligations des partis politiques légalement constitués, y compris les partis politiques d’opposition qui doivent bénéficier d’un statut sous la loi nationale ».
L’Art 4 alinéa 6 stipule : « Les Etats parties s’assurent que les citoyens jouissent effectivement des libertés et droits fondamentaux de l’homme en prenant en compte leur universalité, leur interdépendance et leur indivisibilité »
L’Ong 1 Monde Avenir note également qu’en forçant des jeunes à quitter un parti et adhérer à un autre, cela constitue des actes de violation grave de la liberté des citoyens de s’engager librement dans un parti politique de leur choix, tel que le prévoit le préambule de la Constitution du Cameroun qui précise que « Nul ne peut être inquiété en raison de ses origines, de ses opinions ou croyances en matière religieuse, philosophique ou politique sous réserve du respect de l’ordre public et des bonnes mœurs. »
Que le Président de l’Assemblée nationale en personne ait cautionné des violations aussi graves des normes internationales auxquelles le Cameroun a souscrit ; de notre propre constitution adoptée sous sa présidence, des droits civils et politiques subséquents des citoyens, et cela de manière attentatoire à la cohésion nationale, dans un contexte déjà aux prises avec le Boko Haram, est en réalité constitutif d’outrage à la République, d’insulte à la démocratie camerounaise, et devrait, à minima, être condamné par la Direction de son parti au pouvoir.
Quoi qu’il en soit, L’Ong 1 Monde Avenir et ses partenaires associatifs qui croient au droit à la démocratie du peuple camerounais, et travaillent à son renforcement, expriment leur profonde indignation devant cette pulsion primaire, et leurs craintes de voir ainsi se multiplier des opérations électoralistes entachées de violations barbares des normes et des droits susceptibles d’aggraver ou d’engendrer des conflits pré et/ou post- électoraux aux conséquences dommageables.
1 Monde Avenir et ses partenaires associatifs rappellent le contexte sécuritaire du pays très délétère en ce moment, nourri par les incursions suivies des enlèvements perpétrés par la secte islamique Boko Haram dans la partie septentrionale du pays, et les conflits dans les régions du Nord-Ouest et du Nord-Ouest. Dans un tel contexte, tout acte portant atteinte à l’intégrité des citoyens peut être extrêmement dangereux et servir de prétexte à un embrasement général.
L’Ong 1 Monde Avenir et ses partenaires associatifs, engagent enfin le gouvernement, qui n’a pas jugé le contexte national de crise suffisamment grave pour justifier le report de l’élection présidentiel sur la base de l’article 4 de la Constitution, à respecter et à faire respecter par tous, toutes les dispositions des instruments internationaux et des normes locales relatives au respect des droits des citoyens d’aller et de venir librement, de s’engager librement dans un parti politique sans être inquiété, aux fins d’un climat pré et post-électoral paisible, et d’un résultat électoral crédible. Telles sont, de manière générale, et en année électorale en particulier, les signes probants d’un Etat de droit, dans une nation dite démocratique.
Fait à Douala le 17 juillet 2018