Déclaration sur les manifestations des 23 et 26 janvier 2019
En date du 23 janvier 2019, les députés Joshua Osih et Jean Michel Nintcheu du parti politique de l’opposition le Social Democratic Front accompagnés de plusieurs de leurs militants, ont été brutalement interpelés à Douala alors qu’ils participaient à une marche pacifique pour dénoncer les scandales qui ont conduit au retrait de l’organisation de la Coupe d’Afrique des nations au Cameroun en 2019.
L’un des parlementaires, Jean Michel Nintcheu a été embarqué pour une destination inconnue, et n’a retrouvé la liberté que plus tard en début de soirée du même jour. Des militants ont été violements réprimés, certains ayant vu leurs vêtements complètement déchiquetés par les forces de maintien de l’ordre.
Le samedi 26 janvier 2019, un autre parti politique de l’opposition, le Mrc a initié dans plusieurs villes du Cameroun, des marches pacifiques pour dénoncer le « hold up » électoral, l’inertie qui a conduit au retrait de la CAN et l’enlisement de la crise anglophone.
Ces manifestations ont été violements réprimandés par les Forces du maintien de l’ordre (FMO) lourdement armés de fusils, voitures lance-eaux, boucliers, bâtons, et gaz lacrymogène.
Pendant cette répression sauvage, les armes à feu ont été utilisées sur des manifestants, et particulièrement à Douala, monsieur Célestin Djamen responsable en charge des droits de l’homme au MRC dans une posture complétement inoffensive a reçu des balles aux cuisses, causant des blessures profondes.
On voit également une vidéo dans laquelle un élément des FMO tire à bout portant sur les pieds du nommé Ngankam Gaétan militant du MRC venu s’enquérir de l’Etat de santé de Célestin Djamen interné à l’hôpital général. Trois autres militants parmi lesquels Me Ndocki par ailleurs vice-présidente des femmes du MRC, recevront eux aussi à bout portant des balles tirées d’une arme à feu par les FMO.
De même, plus de cent cinquante militants du MRC ont été interpellés dans les villes de Douala, Bafang, Dschang, Yaoundé, et Bafoussam et Mbouda, et gardée à vue dans diverses cellules.
Le bilan présenté par la voix du Ministre de la Communication, René Emmanuel Sadi fait état de 117 personnes arrêtées et gardées à vue dont 62 à Yaoundé, 42 à Bafoussam et 13 à Mbouda.
Dans la même journée, les locaux des ambassades du Cameroun en France et en Allemagne ont été mis à sacs par des manifestants qui se réclament de la « Brigade anti Sardinard », un groupe de Camerounais de la Diaspora déterminé à « résister » contre le régime actuellement au pouvoir.
Que les marches du Sdf et du Mrc ont été déclarées conformément à la loi n°90 /055 du 19 décembre 1990 fixant le régime des réunions et des manifestations publiques, en son article 6 : « Sont soumis à. l’obligation de déclaration préalable, tous les cortèges, défilés, marches et rassemblements de personnes et, d’une manière générale, toutes les manifestations sur la voie publique. »
Que l’administration Camerounaise y a systématiquement opposé un refus, sans explication convaincante, comme dans cette décision d’interdiction numéro 21/D/C19/01/SP du 18 janvier 2019 signée du Sous-préfet de l’arrondissement de Douala Ier Tchakui Noundie Jean Marie, adressé au président régional du Sdf pour le Littoral, avec comme motif la monotone formule de « risque de trouble à l’ordre public »
Que ces refus automatiques quand il s’agit des manifestations projetées par les partis de l’opposition et/ou la société civile, constitue une entrave au droit fondamental de manifester prévu dans la Constitution Camerounaise, la Déclaration universelle des Droits de l’homme, la charte des Nations-Unies, la charte africaine des droits de l’homme et des peuples, la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance signées et ratifiées par le Cameroun
Qu’au cours de leurs interventions répressives, les FMO ont utilisés des armes à feu pour tirer sur des manifestants, au mépris de l’article 3 de la loi 90-54 du 19 décembre 1990 relative au maintien de l’ordre, qui interdit l’usage des armes dans les opération courantes de maintien de l’ordre public ; « alinéa 1 : l’usage des armes est interdit dans les opérations courantes de maintien de l’ordre public, alinéa 2 : l’emploi du tir à blanc et du tir en l’air est interdit, alinéa 3 : toutefois, les grenades lacrymogènes, les bâtons et autres instruments similaires peuvent être employés, en cas de nécessité, au rétablissement de l’ordre public. «
Qu’en tout état de cause, le comportement des manifestants lors de ces différentes marches n’avait rien d’agressif pouvant justifier l’usage des armes à feu. Les manifestants étaient à mains nues et parfois assis à même le sol quand les FMO les chargeaient.
L’Ong Un monde Avenir déplore et condamne :
- Le durcissement croissant des mesures répressives, ainsi que des traitements toujours plus cruel inhumain et dégradant lors des interpellations des manifestants pacifiques en violation de l’article 5 de la Déclaration universelle des droits de l’homme et la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants de 1984.
- Elle déplore et condamne tout autant les actes de vandalisme et de destructions des biens matériels comme cela s’est vu dans les ambassades du Cameroun à Paris et à Berlin.
- En conséquence, L’Ong Un Monde Avenir :
Appelle les autorités publiques, y compris au niveau des donneurs d’ordre, à se soumettre, comme l’exige tout Etat de droit, aux normes nationales et/ou internationales relatives aux libertés d’expression et de manifestation qui caractérisent une société républicaine
Elle rappelle aux autorités préfectorales et sous-préfectorales que la loi n°90 /055 du 19 décembre 1990 fixant le régime des réunions et des manifestations publiques, les oblige à délivrer aux organisateurs déclarants, et ce sans délai (Article. 8.- Le chef de district ou le sous-préfet qui reçoit la déclaration en délivre immédiatement récépissé) un récépissé de leur déclaration, et d’assurer l’encadrement approprié de leur manifestation, et ne les autorise pas à présumer des risques de troubles à l’ordre public que pourrait entraîner la manifestions.
Elle exige que les autorités procèdent immédiatement à la libération des personnes interpellées dans le cadre des manifestations des 23 et 26 janvier 2019, et à la prise en charge médicale complète des blessés,
Elle demande que les éléments des FMO ayant fait usage d’arme à feu sur les manifestants soient identifiés, interpelés et sanctionnés conformément à la loi,
Elle appelle les manifestants de l’intérieur comme de l’extérieur du pays, à toujours faire le meilleur usage de leur droit, en restant pacifiques dans les manifestations,
Elle attire l’attention :
– Des FMO auteurs des exactions, sur leurs responsabilités individuelles face aux violations des lois de la république
– Du Gouvernement sur ce que les interdictions systématiques de manifestations, sont susceptibles de conduire le pays a une implosion
A ce sujet, 1MA propose a la méditation des autorités publiques camerounaise en général et du MINAT en particulier les propos ci-après du feu le président JF Kennedy ; A vouloir rendre la révolution pacifique impossible on rend la révolution violente inévitable.
Fait à Douala, le 28 Janvier 2019 Le Coordinateur
Philippe NANGA