TITRE : « Les libertés publiques au Cameroun : La dérive ! »
Messieurs/Mesdames chers/chères membres du conseil
- RAPPEL DES ENGAGEMENTS DU CAMEROUN
L’Etat du Cameroun s’est engagé à protéger et promouvoir les libertés publiques de tous les citoyens sur l’ensemble du territoire national. Ces engagements ont été pris tant au niveau national, régional qu’international.
- Au niveau national
- Préambule de la Loi 96/06 du 18 janvier 1996 portant révision de la Constitution du 02 juin 1972 modifiée et complétée par la loi n°. 2008/001 du 14 avril 2008
« Nul ne peut être inquiété en raison de ses origines, de ses opinions ou croyances en matière religieuse, philosophique ou politique sous réserve du respect de l’ordre public et des mœurs ; »
- La Loi n°90 /055 du 19 décembre 1990 fixant le régime des réunions et des manifestations publiques au Cameroun.
- La loin°90-53 du 19 décembre 1990 portant sur la liberté d’association
- Au niveau régional
- La Charte Africaine Des Droits de L’homme et des Peuples
- Les Lignes Directrices sur la Liberté d’Association et de Réunion en Afrique
- La Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance.
- La Déclaration de Principes sur la Liberté d’Expression en Afrique
- Au niveau international
- Le Pacte relatif aux droits civils et politiques :
- La Déclaration universelle des droits de l’homme :
- EXPOSE DES FAITS
Le Cameroun traverse depuis 2016, des crises sociopolitiques qui ont connu un pic en 2019 après l’élection présidentielle de 2018. Depuis cette période, l’ONG Un Monde Avenir a recensé plus d’une trentaine de cas de violation des libertés publiques :
- Violations de la liberté d’expression
- Cas Dr. Pierre Yves Bassong, pour ses opinions : en Mai 2017, le neurologue en service à l’hôpital régional de Bamenda et enseignant à l’université de la même ville, a été affecté à l’hôpital de District de Somalomo dans la région de l’Est, alors que sa spécialité ne le prédispose pas à exercer dans une institution sanitaire de cette catégorie. Cette situation serait due au fait qu’il aurait librement exprimé son opinion sur le système de santé au Cameroun, entant que Président du Syndicat des Médecins du Cameroun.
- Cas d’au moins six journalistes arrêtés pour leurs opinions et analyses : à travers le pays, suite à la publication d’informations critiques à l’endroit des autorités camerounaises quant à la gestion de la crise anglophone, ils ont été harcelés par la justice en raison de l’exercice légitime de leur profession, à l’instar de Michel Biem Tong, Franklin Mowha, Kinsgley Ndjoka, Samuel Wazizi, Ahmed Abba.
- Cas Me Félix Agbor Kongo Balla, pour ses opinions : Le06 mai 2020, l’avocat et enseignant de droit à l’université de Buéa, a été licencié par sa hiérarchie à l’issue d’un conseil de discipline marathon convoqué le même jour, pour avoir proposé un sujet d’analyse à ses étudiants.
- Cas Pr Pascal Charlemagne Messanga Nyamding, pour ses opinions politiques : Professeur des Universités en service à l’institut des relations internationales (IRIC) de Yaoundé. Il a fait objet de convocation le 09 mars 2021 au Secrétariat d’Etat à la Défense (SED, a été interpellé et traduit en conseil de discipline pour ses opinions acerbes et ses points de vue très critiques vis-à-vis de certaines hautes personnalités du régime du président Paul BIYA. Sur sa page facebook à travers un communiqué, il a déclaré recevoir des menaces de mort et des intimidations administratives.
- Cas Dr. Fridolin NKE, pour ses opinions politiques: Enseignant de philosophie à l’Université de Yaoundé 1, le Dr Fridolin NKE fait objet d’harcèlement par le Commandant de la Sécurité Militaire (SEMIL) le Colonel Joël Émile Bamkoui pour avoir dénoncé et appelé à la fin de la guerre qui sévit dans les régions du Nord-ouest et Sud-ouest du Cameroun depuis 2016. Il a déjà fait objet de deux convocations à lui adresser par la division de la SEMIL les 23 et 28 Juillet 2021. Ce dernier a déclaré sur sa page facebook, subir des menaces de mort et intimidations de la part dudit Colonel.
- Violations de la liberté de manifestation et de réunion
Entre Avril 2020 et Juillet 2021, l’ONG Un Monde Avenir a répertorié au moins quinze (15) cas de violations de la liberté de réunion dont les plus patents sont :
- Le siège du parti d’opposition Cameroon People’s Party (CPP) a été encerclé par plus de 30 policiers et gendarmes, lors d’une réunion.
- Arrêt d’une réunion privée du bureau départemental PCRN (Parti Camerounais pour la Réconciliation Nationale) Nyanon dans le domicile du député Hon. François BIBA
Et au moins vingt (20) cas de violation de la liberté de manifestation, dont les cas les plus patents :
- Interdiction systématique de toutes les manifestations publiques (marches pacifiques) projetées par certains partis politiques de l’opposition à l’instar du MRC, SDF (Social Democratic Front), le CCP (Cameroon People’s Party) sur toute l’étendue du territoire national.
- Mis en garde du ministre de l’Administration territoriale pour toute initiative de manifestation publique portée par les partis politiques de l’opposition ou toute autre personne, en lien avec la tenue des élections régionales.
- L’interdiction de manifestation publique des patrons de presse du Cameroun prévue à l’occasion de la journée internationale de la liberté de la presse.
- Arrestations et détentions arbitraires et illégales
- Cas de 05 militants du mouvement Stand Up for Cameroon: Le 18 septembre 2020, Tehle Membou, Mira Angoung, Nana Collins, Moussa Bello et Etienne Ntsama ont quitté la réunion régulière #FridayInBlack organisée au siège du CPP (Cameroon People’s Party) à Douala et se sont rendus en route afin de trouver un taxi pour rentrer chez eux. Quelques minutes plus tard, ils ont été enlevés par les agents de la gendarmerie pour une destination inconnue.
Sans mandat, convocation ni motif légal, Tehle Membou, Mira Angoung, Nana Collins, Moussa Bello et Etienne Ntsama ont été arrêtés et sont détenus à la prison de New-Bell à Douala depuis 1 an déjà.
Ils sont poursuivis par le tribunal militaire de Douala pour conspiration, de révolution et insurrection. Après avoir passé six (6) mois en détention, la première audience a finalement été programmée en Avril 2021 et dès lors, le procès a essuyé déjà 05 renvois.
- Cas des 124 militants du MRC (Mouvement pour la Renaissance du Cameroun): près de 200 militants, sympathisants et cadres de ce parti politique avaient été arrêtés lors de la marche pacifique organisée par leur parti politique et, détenus dans les prisons de New-bell, Bafoussam, Mfou et de Kondengui depuis 1 an déjà. A ce jour, 124 d’entre eux sont encore détenus dans ces mêmes prisons. Dans un rapport commis le 09/09/2021 par le collectif d’avocats constitué pour la défense, celui-ci annonce son désistement de l’affaire : « Ne pouvant plus continuer à fournir des prestations d’Avocat dans ces conditions qui vont à l’encontre de notre serment d’avocat, nous prenons la décision de notre retrait des procédures en cours qui concernent les 124 prisonniers des marches du 22 septembre 2020, pour ne pas avoir à nous associer à l’arbitraire et à l’illégalité ».
Au vu de ce qui précède, l’ONG Un Monde Avenir
- Dénonce ces actes répressifs et d’acharnements sur des universitaires qui s’investissent en tant qu’homme de science à la diffusion du savoir et qui font preuve d’une liberté d’opinion,
- Dénonce toutes les arrestations arbitraires et illégales dont sont victimes les membres du MRC et du mouvement Stand Up for Cameroun
- Dénonce les violations de libertés de manifestation et de réunion dont sont victimes les partis politiques de l’opposition, des journalistes et des organisations de la société civile
- RECOMMANDATIONS
L’ONG Un Monde Avenir :
- Attire l’attention du conseil, sur la responsabilité du Président de la République du Cameroun quant à la protection de l’intégrité physique et morale de tous les citoyens camerounais.
- Demande au conseil d’interpeller l’Etat du Cameroun sur l’urgence de revoir l’article 2 de la loi sur le terrorisme qui expose, les auteurs de manifestations pacifiques à la condamnation à vie.
- Demande au conseil d’interpeller l’Etat du Cameroun sur l’impérieuse nécessité de libérer tous les citoyens détenus dans les prisons du Cameroun pour avoir exprimés leurs opinions politiques
- Demande au conseil, de prendre une résolution visant à emmener le gouvernement du Cameroun au respecter des Traités, conventions et autres instruments internationaux relatifs aux libertés publiques, a la lumière des Lignes Directrices sur la Liberté d’association et de Réunion en Afrique.
- Demande au conseil d’interpeller l’Etat du Cameroun concernant le non-respect des directives et principes sur le droit à un procès équitable et a l’assistance judiciaire en Afrique.
Fait à Douala le 11 Septembre 2021 Le Coordonnateur
Philippe NANGA
consultez le lien suivant pour avoir tout le document : Communication 1MA 48è session des droits de l’homme Nations Unies